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18 septembre 2007

Le propriétaire de la poule aux oeufs d'or

Le propriétaire de la poule aux œufs d’or trouvait chaque matin dans la paille de son poulailler un bel œuf luisant du plus précieux métal. Il l’échangeait au marché contre autre chose : des fruits, des légumes, des habits neufs, etc. Rien de bien faramineux ; juste de quoi survivre.

(On peut penser qu’il n’était pas très malin de céder ses œufs contre si peu de choses, mais c’est ainsi que faisait son père et son grand-père… Le propriétaire avait hérité la poule de ses ancêtres, et faisait comme ils avaient fait, sans se poser trop de questions.)

Le propriétaire de la poule aux œufs d’or vivait seul et parfois, il n’avait pas le moral.

Un soir, pour la première fois, il décida de faire un tour au bar du village.

C’est là qu’il rencontra… Non, je vais tourner ma phrase autrement : c’est là qu’il fit une mauvaise rencontre.

Ce villageois-là n’avait l’air de rien, l’air de n’importe qui, l’air de tout le monde. Son visage était remarquable par son absence de signe particulier, et lorsqu’il se tenait immobile devant un mur, on avait du mal à s’apercevoir qu’il était là.

Ce villageois-là devint l’ennemi intime du propriétaire de la poule aux œufs d’or, c’est-à-dire qu’il fit en sorte de lui inspirer confiance. Le propriétaire de la poule aux œufs d’or lui parlait et l’écoutait… ce fut son erreur, et il la paya cher.

Petit à petit, par petites phrases glissées l’air de rien dans la conversation, ce villageois-là commença à instiller le doute dans l’esprit du propriétaire de la poule aux œufs d’or : les beaux œufs dorés qu’il récoltait étaient-ils vraiment en or ?

Ou s’agissait-il seulement de contre-plaqué ?...

Le propriétaire de la poule ne s’était jamais posé cette question auparavant, mais dès qu’il se la posa, le villageois en profita pour lui greffer un nouveau doute…

De semaine en semaine, de petit verre de cidre en grand verre de vin, le propriétaire de la poule aux œufs d’or en vint à croire tout ce que lui suggérait le villageois maléfique.

Il faut dire que lorsque le propriétaire de la poule aux œufs d’or avait atteint un certain stade d’imbibition alcoolique, le villageois sortait de sa poche un pendule, et l’hypnotisait. Puis, il lui susurrait des phrases soigneusement choisies d’une voix douce. Dans l’esprit suggestionné du propriétaire, un nouveau point de vue prenait peu à peu forme.

Un jour, le propriétaire de la poule aux œufs d’or se réveilla à cinq heures du matin : sa poule grattait le bas de la porte en gloussant avec insistance pour réclamer du grain.

Cette petite contrariété, dont il pouvait tenir sa poule pour responsable, fut la goutte d’eau qui fit déborder le vase…

(Mais le vase lui-même n’avait pas été rempli par la pauvre petite poulette, qui n’en pouvait mais, mais bien par le villageois malfaisant.)

Le propriétaire de la poule aux œufs d’or se dit alors :

« Mais pourquoi je me complique la vie avec ce stupide volatile qui ne sait que caqueter et faire caca partout ?!... Depuis le temps que je me fatigue à la nourrir… Et ses œufs ne valent rien, d’ailleurs cela fait des mois je n’ose même plus les porter au marché. Qui voudrait du laiton doré ?... ça a suffisamment duré ; aujourd’hui est le jour de la libération ; aujourd’hui cette insupportable volaille va enfin se rendre utile. »

Et sans réfléchir davantage, le propriétaire tordit le cou de sa poule et en fit une poule au pot.

Il la mangea, puis se rendit au bar pour retrouver son « cher ami. »

Lorsqu’il lui annonça qu’il avait tué et mangé la poule, l’autre se mit à rire, à rire à gorges déployées, à rire encore et encore.

Lorsqu’il eut ri tout son saoul, il adressa ces paroles mémorables à l’ex-propriétaire de la poule aux œufs d’or :

« Pauvre crétin ! Tu as détruit ta seule ressource, ton seul espoir… Tu étais riche sans le savoir, et maintenant tu n’as plus rien ! Tu ne retrouveras jamais, jamais et nulle part, une poule comme la tienne. Tu as tout perdu, et tout perdu par ta faute, imbécile ! Je ne t’ai pas forcé à faire ce que tu as fait, c’est toi le seul responsable. Ton échec t’appartient. »

Et sur ces mots, le villageois s’en alla, laissant l’ex-propriétaire de la poule aux œufs d’or seul.

Fin (tragique) de l’histoire.

Ceux qui prônent le suicide disent parfois : « quand on se sent mort, quand on est déjà aux trois-quarts mort… cela ne fait pas une si grande différence de se tuer pour de bon. »

Cela fait la même différence qu’entre une jambe cassée et une jambe coupée : la jambe cassée guérit, la jambe coupée ne repousse pas.

La vie est une poule qui nous offre chaque matin un nouveau trésor, une nouvelle chance, une nouvelle journée en or. Mais nos ancêtres n’en faisaient pas grand-chose, de ce trésor, et nous non plus.

Le jour où nous prêtons l’oreille au mauvais conseiller, nous en venons à croire que la poule est sans valeur, que ses œufs ne sont que du toc.

Si nous lui tordons le cou, nous aurons tout perdu, et il n’y aura pas de seconde chance.

3 commentaires:

  1. Bonjour

    D’abord bravo de mettre votre livre en PDF gratuit sur lulu, ça change des guignols qui vendent leur PDF à cent, deux cent euros et même plus cher (j’en ai trouvé un à 270 euros rubrique développement perso !)
    Deuxième bravo : écrire un livre de 353 pages c’est pas donné à tout le monde, il faut le noircir le papelard même avec 40 pages de citations, il faut les connaître !
    Troisième bravo : félicitations pour votre style, c’est très bien écrit et surtout très simple et très compréhensible (faire simple, c’est un exploit en psy)

    A part ça votre livre m’a assez plu, bien qu’il tourne un peu beaucoup sur lui même. Un bémol cependant, votre solution à la déprime passe par l’intellect et surtout la LOGIQUE ! Une logique binaire ultra manichéenne, Bien ou Mal, choisis ton camp, un point c‘est tout !
    Vous ne trouvez pas ça un peu réducteur ? D’ailleurs beaucoup de déprimés n’ont pas de logique, comme beaucoup de non déprimés d’ailleurs.

    Question : Avez-vous déjà vécu l’expérience de ce que les yogis appellent l’éveil de la kundalini ? Tolle, oui semble-t’il et moi aussi et sans avoir rien demandé un beau matin dans le demi sommeil !
    Si vous aviez vécu cette expérience extraordinaire alors vous comprendriez ce que veut dire Tolle en parlant du mental, car cette expérience du monde non manifesté ne peut se traduire par des mots et encore moins par la logique : un monde plein d’énergie mais où il n’y a rien à dire pour la bonne raison qu’il n’a pas de contenu écrit justement Tolle (entre nous un sacré pied de nez à tous les bigots).
    A part ça Tolle vend des CD, des bouquins comme tous les autres : Dalai lama et abbé Pierre compris et vous aussi ! (votre version papier cartonné à 35 euros, c’est pas donné )


    Pour finir j’ai beaucoup aimé la façon dont vous vous moquez des psy. Je les connais bien aussi car ma femme est dépressive depuis 20 ans. Elle, ce sont les psychiatres qu’elle fréquente avec antidépresseurs etc. Elle est hyper logique (QI de 140, bac à 16 ans) mécréante et surdouée en sudoku et pourtant sujette à des crises d’angoisse inexpliquées et son intellect ne l’aide pas, bien au contraire.
    Tous ces psytrucs m’ont toujours fait rire, tout ce qu’ils savent faire, c’est d’employer des mots savants pour désigner des symptômes qu’ils ne comprennent pas, vous l’avez très bien décrit. Par contre ce qu’ils ont bien compris c’est comment remplir leur portefeuille.

    Quelques coquilles (on a beau relire mille fois il en reste toujours au moins une)
    - page 108 : la sagesse c’est de remplacer « s’est maintenant ou jamais … » je pense que, c’est un c !
    - Page 211 : pourquoi se besoin …
    - Page 230 : allé -retour, allé -retour
    - page 265 : gueules de bois

    Une citation que vous avez oubliée dans votre trop plein de certitudes :
    Tout ce que je sais, c’est que je ne sais pas, Jean Gabin quelques mois avant sa mort

    Bien cordialement et encore bravo pour votre style.

    Patrick SOYER

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  2. Merci Patrick pour ce très riche commentaire...
    et merci pour le relevé des fautes ! :-) que j'ai pu ainsi enlever...
    (par conte je ne vois pas où est la faute dans "gueules de bois" ?)

    Pour l'absence de logique des non-déprimés et des déprimés, je ne pense pas qu'elle soit irréversible - d'ailleurs moi-même, j'avais perdu toute logique dans ma période mystique et je l'ai retrouvée par la suite.

    Pour la kundalini... l'existence de ce "serpent" me laisse un peu sceptique. Je ne nie pas les sensations ineffables que l'on peut ressentir lors de certaines périodes mystiques, mais dans la mesure où elles sont ineffables, justement, je ne vois pas très bien ce qu'on peut construire à partir d'elles.

    Tolle veut débarrasser les gens de son mental alors qu'il a conservé le sien : c'est ça, qui pose problème ! La capacité à compter est indiscutablement une des propriétés du mental raisonneur... Il vend intelligemment ses livres et CD et demande à ses lecteurs de devenir idiots.

    Pour la citation de Jean Gabin, tout ce qu'elle implique, c'est que Jean Gabin savait qu'il ne savait pas qq mois avant sa mort - ce qui est effectivement un net progrès par rapport à ceux qui croient savoir alors qu'ils ignorent, mais qui n'impliquent pas automatiquement que la vérité soit inconnaissable.
    Après tout, peut-être que qqn d'autre a dit qq mois avant sa mort : "heureusement que je suis au courant", et que c'était vrai.

    Merci encore pour ce commentaire très instructif ; je vais essayer de nuancer davantage mes certitudes...

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  3. ...et j'en tiendrai compte pour "Marre de la vie (volume 2)", car il y a effectivement beaucoup de points à approfondir.

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